Lors des questions au Gouvernement du mercredi 23 janvier 2013, la ministre Marie-Arlette Carlotti a la députée Hélène Geoffroy sur le plan pluriannuel contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale. Adoptées lundi lors du comité interministériel contre les exclusions, les mesures proposées dans le plan visent tout à la fois à répondre à l’urgence sociale du moment et à structurer la politique de solidarité du Gouvernement sur le long terme.
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2013 : les voeux de la ministre Marie-Arlette Carlotti aux forces vives
La ministre déléguée en charge des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion s’est exprimée à l’occasion des vœux aux forces vives, mardi 22 janvier 2013 au Ministère. Voici son intervention.
Mesdames, Messieurs les parlementaires,
Mesdames, Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs, les responsables associatifs
Mesdames, Messieurs,
Je tenais à vous réunir en ce tout début d’année pour vous remercier du travail accompli en 2012. Ce furent mes premiers contacts, mes premières rencontres, mes premiers chantiers. Ces chantiers je veux les mener jusqu’au bout. J’ai encore beaucoup à faire je le sais.
Je souhaite continuer à vous associer systématiquement au travail que j’engage pour les personnes handicapées et celles en situation de pauvreté.
J’ai souhaité vous réunir, vous, forces vives de la Nation, parce que je sais que sans vous, aucune action politique d’envergure n’est possible. On peut toujours ajuster tel ou tel dispositif, suggérer une nouvelle allocation du budget, mais les réformes de fond, celles qui véritablement vont changer la donne à moyen et à long terme, celles-ci seront le fruit de notre collaboration.
J’ai souhaité vous réunir, vous, acteurs des deux champs dont j’ai la responsabilité, parce que si je mesure évidemment tout ce qui distingue le handicap de la pauvreté, et la pauvreté du handicap, je voulais en ce début d’année, souligner, pour la première fois, ce qui nous rassemble.
En ce début d’année 2013, je formule le vœu que, ensemble, nous construisions une société plus solidaire, plus tolérante, et plus démocratique.
Une société plus solidaire, car la vie fait parfois que, de manière passagère ou plus durable, nous ayons particulièrement besoin des autres. La vie qui distribue avec un certain sens du tragique les moments de joie et les coups durs, met les personnes handicapées et les personnes démunies, dans une situation inhabituelle de dépendance. Répondre à cette dépendance nous honore. Répondre à cette dépendance, c’est rappeler que nous formons une seule et même communauté, celle qui fait l’identité et la grandeur de la nation française : la République. Cette communauté est par définition une communauté qui inclut. Quand elle y échoue, elle s’abîme et c’est la nation entière qui est dans le malaise.
Pour cette raison, les politiques de solidarité que nous menons ne sont pas des politiques de charité, de pitié, mais des politiques qui misent sur les capacités des personnes, quelle que soit leur condition. Il ne s’agit pas de « dédommager » tout en acceptant d’enfermer la personne dans un statut et dans une condition dont elle ne sortira jamais, mais de trouver à chaque fois, les leviers de son émancipation.
Une société plus tolérante, car nous devons reconnaître nos différences sans les craindre. Nous devons avoir la conscience à la fois que nous sommes unis, que nous sommes engagés par un même destin, et en même temps que la singularité de chacun doit être respectée et valorisée.
Je parle souvent de l’importance de changer de regard. Car les personnes handicapées comme les personnes démunies souffrent aussi de cela : du regard des autres, de leur malaise, ou de leur défiance face à l’altérité, face à ce qui semble étrange parce qu’étranger.
Changer de regard sur le handicap pour arrêter de l’appréhender exclusivement comme une carence ; voir que le handicap, c’est aussi et surtout un problème d’environnement et d’organisation de société. Et que par conséquent, nous sommes tous concernés, tous interpellés.
Changer de regard sur la pauvreté et voir que ceux qui en souffrent ne l’ont pas choisi, ne sont pas des profiteurs ou des fraudeurs, mais des personnes qui sont victimes d’une défaillance collective. Et que par conséquent, chacun est concerné. Nous devons y remédier collectivement, en prenant des décisions politiques qui vont dans le sens de plus de justice et de solidarité.
Une société plus démocratique enfin. Car je suis persuadée que la construction d’un monde commun, que la recherche de l’égalité, passe désormais par une plus grande attention à la parole de chacun. Je veux tant que possible dépasser les logiques de dispositif pour faire place aux parcours de vie, je veux tant que possible que la solidarité se conjugue à l’attention à autrui, à un accompagnement soucieux de la personne, de l’humain.
Et cela, j’en suis persuadée, passe par la prise en compte de la parole des usagers, des bénéficiaires, bref des personnes que les politiques publiques veulent aider. La participation des bénéficiaires de l’action sociale à la « Conférence Nationale de Lutte contre la Pauvreté » a été un véritable succès. Je veux m’appuyer sur cette expérience réussie pour concevoir et améliorer toutes les politiques publiques dont j’ai la charge.
Une démocratie renouvelée, c’est une démocratie qui sait dialoguer à tous les niveaux : au niveau national comme au niveau local, avec les élus et les représentants de l’Etat, avec les corps intermédiaires, les associations et les syndicats, et avec les citoyens, tous les citoyens.
Je ne veux pas être trop longue et vous assommer avec ma feuille de route. Nous aurons l’occasion d’y revenir avec précision dans des moments plus appropriés. Mais je veux vous dire que ces principes seront mis en œuvre concrètement dès 2013.
Hier, a été officiellement adopté le « Plan Pluriannuel Contre La Pauvreté et pour l’Inclusion Sociale », lors de la réunion du Comité Interministériel de Lutte contre l’Exclusion, réuni sous l’autorité du Premier Ministre, et qui n’avait plus été réuni depuis 2006. Pour faire reculer la pauvreté, nous allons agir sur tous les fronts : celui de l’accès aux droits, celui de l’emploi, celui du logement celui de la santé, celui de la famille et de l’éducation… A travers l’augmentation du RSA, à travers la « garantie jeunes », à travers le relèvement du plafond de la CMU-C, à travers le logement social, à travers l’accueil de la petite enfance… partout où nous pourrons faire reculer la pauvreté, nous le ferons.
Nous le devons car nous ne pouvons accepter que 14% de la population vivent en dessus du seuil de pauvreté.
Dans le domaine du handicap, le Premier Ministre a annoncé la tenue d’un « Comité Interministériel du Handicap ». Ce sera un rendez-vous majeur qui confirme la volonté du Gouvernement de traiter le handicap dans toutes ses dimensions.
J’attends dans les prochains jours le rapport de la sénatrice Madame Campion sur l’accessibilité. Elle remettra son rapport au Premier Ministre, et nous devrons prendre rapidement les décisions pragmatiques qui nous permettront de progresser d’ici l’échéance de 2015.
Je suis très attentive aux travaux du groupe de travail que nous avons mis en place dans le cadre de la Refondation de l’Ecole sur la professionnalisation de l’accompagnement des enfants en situation de handicap. J’ai la conviction que c’est un élément clé de l’accès de tous à l’école. Ces conclusions seront rendues au mois de mars.
Vous savez par ailleurs que nous allons lancer un 3è plan autisme. J’irai ce mois-ci rencontrer des professionnels belges et les autorités belges, afin de voir ce qui en Belgique fonctionne bien, pour nous inspirer des bonnes pratiques.
Sur tous ces chantiers, comme sur ceux que je n’ai pas détaillés, comme le travail en cours sur l’accès aux soins ou les avancées nécessaires en matière d’emploi ou de formation professionnelle, sur tous les chantiers je compte vraiment sur vous
Je compte sur les parlementaires, sur leur vigilance, comme sur leur esprit d’initiative, pour que le handicap continue à être systématiquement intégré dans nos lois, et que l’arsenal anti-pauvreté se mette rapidement en place.
Je compte sur les associations, sur leur engagement en toute indépendance, sur leur participation critique et constructive, pour que, ensemble, et par delà nos différences, nous réussissions en 2013 à sortir de la crise en restant unis et solidaires.
Seul le prononcé fait foi.
Comité interministériel contre les exclusions : de véritables avancées
Lundi 21 janvier j’ai participé en tant que Ministre en charge de la lutte contre l’exclusion au lancement du plan gouvernemental contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale. Cette feuille de route, élaborée en concertation avec de très nombreuses associations et les pouvoirs publics, prévoit des solutions concrètes pour réduire les inégalités.
Outre la revalorisation de 10% du RSA d’ici 2017, nous agissons avec le gouvernement sur des besoins spécifiques comme l’accès aux soins des plus démunis en augmentant le plafond de la CMU complémentaire pour y intégrer 750 000 personnes de plus, et notamment de nombreux travailleurs pauvres. Les familles monoparentales, souvent en situation de grande précarité, seront également mieux accompagnées. Des mesures de lutte contre le surendettement qui plonge de plus en plus de familles dans la pauvreté, vont être élaborées tandis qu’un observatoire de l’inclusion bancaire vérifiera les pratiques des banques envers leurs clients les plus en difficulté. L’hébergement d’urgence pour les personnes sans abris sera renforcé et les jeunes sans qualifications, particulièrement touchés par le chômage, sont également concernés par ce plan qui prévoit l’instauration d’une « garantie jeune » leur offrant un accompagnement intensif vers l’emploi.
Ces annonces concrétisent l’engagement fort du gouvernement de lutter contre la pauvreté et l’exclusion et de placer la solidarité au cœur du redressement de notre pays.
Marseille : se souvenir de la rafle de l’Opéra et du Vieux Port
A l’occasion du 70ème anniversaire de l’évacuation et de la déportation des populations des quartiers du Vieux Port et de l’Opéra, Marie-Arlette Carlotti s’est exprimée au nom du gouvernement lors de la cérémonie qui s’est tenue le 20 janvier 2013.
Mesdames, Messieurs,
Il est essentiel que nous soyons aujourd’hui réunis. Une actualité chasse l’autre à une vitesse vertigineuse ; chacun est pris dans le tourbillon de la vie, avec ses contraintes, ses plaisirs et ses urgences. Mais il est des moments où il faut s’avoir faire une pause. Prendre le temps de s’extraire de ce mouvement incessant pour se retourner sur l’histoire. Redonner de l’épaisseur au temps, se souvenir.
Se souvenir qu’un dimanche de janvier 1943, il y a 70 ans, Marseille a pleuré devant le spectacle ignoble de ces Marseillais emmenés à Compiègne par la volonté commune du régime nazi et de celui de Vichy. Se souvenir qu’un quartier entier de la ville a été détruit, suspect d’être trop rebelle, trop cosmopolite, trop… marseillais !
Si l’on devait dessiner l’envers de l’idéologie nazie, je suis persuadée que l’on verrait apparaître les contours de Marseille, cette ville façonnée par l’amour de tous ceux qui ont décidé d’y faire leur vie, d’où qu’ils viennent, de Grèce, d’Arménie, d’Italie, de Corse, du Maghreb ou des Comores. Cette ville si fière qu’elle ne supporte pas que sa liberté soit menacée ; cette ville si impertinente qu’elle ne peut envisager de se soumettre.
Ce 23 janvier 1943, la faillite morale et le cynisme de certaines de ses élites sont venus prêter main forte à l’idéologie de la haine pour éliminer des Juifs, des résistants, et tous ceux qui gênaient l’ordre morbide que cette idéologie avait établi.
Ce jour-là, des familles ont été à jamais séparées ; des personnes de tous âges à qui la vie avait certainement fait plein de promesses ont perdu en quelques heures tout espoir.
Ce jour-là, des Français, des Marseillais, ont décidé de nier ce que sont les valeurs fondamentales de la France et l’identité de Marseille.
Ce jour-là, ceux qui ont tourné le dos à la République ont piétiné le peuple de Marseille, la nation française, et finalement l’humanité.
Ce jour-là, les obscurantismes nazi et fasciste ont frappé le continent européen, ont frappé la France, ont frappé Marseille.
Aujourd’hui, d’autres obscurantismes sévissent ailleurs dans le monde et notamment en Afrique, au Mali. La décision du Président de la République de faire intervenir les forces armées françaises au Mali est la conséquence du refus de la France de voir notre commune humanité remise en cause.
Maintenir les valeurs humanistes et républicaines vivaces exige des choix courageux.
Elle exige aussi un travail quotidien, qui engage au premier chef les élus de la République.
Elle exige enfin des moments exceptionnels, comme celui-ci, des moments de mémoire et de recueillement. Ils exercent notre conscience pour que le moment venu, quand, sous une forme peut-être inédite, notre liberté et notre intégrité seront menacées, nous sachions le voir et trouver la force de nous élever.
Acceptez que Marseille réussisse !
Sur le Vieux Port, samedi soir, l’émotion était palpable. J’ai vu des Marseillais unis, joyeux et fiers de leur ville. J’ai vu des Marseillais des quartiers sud et des quartiers nord se réunir et répondre présents à l’invitation qui leur avait été lancée. J’ai vu ma ville reprendre des couleurs alors qu’elle était si blême ces derniers mois… ces dernières années.
Marseille a montré son plus beau visage, grâce à des Marseillais mobilisés et conscients de l’enjeu de cette soirée pour leur ville.
Pourtant, ces mêmes Marseillais ont découvert en lisant la presse nationale que leur enthousiasme était sans fondement, que cette soirée frisait le ridicule, voire qu’elle était une escroquerie.
Décidément, Paris a du mal à comprendre Marseille.
Paris a du mal à comprendre que Marseille avait besoin de se retrouver dans cette période où elle ne sait plus bien où elle va.
Paris a du mal à comprendre qu’un grand mouvement culturel et politique, à l’instar de la Movida en Espagne, est possible à Marseille.
Mais que ce mouvement repose sur l’unité des Marseillais, la confiance retrouvée, et un désir ranimé. Que tout cela, tout ce qui fait l’énergie et la force de Marseille, a été réveillé ce soir du 12 janvier.
Samedi, 400 000 Marseillais rassemblés autour du port, ont montré que Marseille était pleine de ressources ; 400 000 Marseillais rassemblés ont clamé qu’ils étaient prêts à donner un nouvel élan à leur ville. Samedi fut un véritable succès et il est urgent, pour Marseille, et pour la France, que les observateurs s’en rendent compte.
Rencontre avec les équipes de l’Association Nationale de Développement des Épiceries Solidaires à Rungis
Marie-Arlette Carlotti s’est rendue ce matin au marché de Rungis pour rencontrer l’équipe de l’Association Nationale de Développement des Épiceries Solidaires (A.N.D.E.S.). Créée en 2000 par Guillaume Bapst, elle soutient l’implantation et le développement des épiceries sociales et solidaires en France. L’A.N.D.E.S. est l’une des principales associations françaises d’aide alimentaire, aux côtés de la Croix Rouge, de la Fédération Française des Banques Alimentaires, des Paniers de la Mer, des Restos du cœur et du Secours Populaire.
Depuis 5 ans, l’association implante des chantiers d’insertion sur les marchés de gros pour redistribuer des fruits et légumes invendus à l’ensemble des réseaux d’aide alimentaire, tout en permettant à des personnes en situation d’exclusion de s’insérer durablement dans l’activité économique.
Lancement de l’association « Marseille et moi »
En ce début d’année 2013, j’ai tenu à m’engager auprès de l’association « Marseille et moi ».
Notre ville doit pouvoir se relever. Marseille n’est pas qu’une ville à la dérive. Marseille c’est surtout une ville au potentiel insoupçonné. A la fois jeune et rebelle, Marseille ne manque pas d’atouts. Si nous avons la ferme volonté de mobiliser toutes ses richesses, nous pourrons faire de Marseille la capitale de la méditerranée.
Je suis convaincue que cela ne se fera pas sans vous. Nous devons rassembler l’ensemble de la société civile marseillaise. Citoyens engagés, créateurs, artistes, entrepreneurs, fonctionnaires, professionnels de la santé ou responsables associatifs : chacun doit pouvoir apporter sa pierre à l’édifice.
Sur le Vieux Port, samedi 12 janvier au soir pour le lancement de Marseille Provence Capitale Européenne de la Culture, les marseillaises et les marseillais ont montré que rassemblés, ils étaient capables de beaucoup. Ils ont montré que peu importe d’où l’on vient à Marseille, l’important c’est d’être marseillais. En un mot, aimer sa ville et la respecter. Ce seul et même sentiment d’appartenance suffit à rassembler toutes les générations de marseillais.
« Marseille et moi » est l’outil de travail qui doit permettre de nous rassembler autour de la construction d’un projet pour notre ville.
« Marseille et moi » est la rencontre d’experts et de citoyens, tous animés par l’envie de faire vivre Marseille et de s’épanouir au sein d’un cadre de vie propice à tous les marseillais.
« Marseille et moi » a vocation à rassembler tous les acteurs de la société civile, du monde associatif et culturel, toutes les femmes et tous les hommes qui veulent s’engager.
« Marseille et moi » a pour ambition de faire vivre le débat démocratique, sur tous les grands dossiers municipaux.
Cette année 2013 doit-nous permettre de sortir des propositions pour le devenir de notre ville. C’est la responsabilité de « Marseille et moi », c’est notre responsabilité, c’est la responsabilité des marseillaises et des marseillais.
Marie-Arlette Carlotti invitée de Ruth Elkrief
Marie-Arlette Carlotti était mardi 11 décembre 2012 l’invitée sur BFM TV de Ruth Elkrief, après la conférence nationale de lutte contre la pauvreté.
Marie-Arlette Carlotti : l’invitée de Ruth Elkrief par BFMTV
Conférence pauvreté : discours d’ouverture de Marie-Arlette Carlotti
Durant deux jours se tient la Conférence nationale contre la pauvreté et pour l’inclusion sociale. Voici le discours d’ouverture de Marie-Arlette Carlotti, ministre déléguée en charge des personnes handicapées et de la lutte contre l’exclusion.
Mesdames, Messieurs,
La pauvreté n’est pas une fatalité. La qualité des propositions suggérées dans les rapports, l’énergie déployée ces dernières semaines, me rendent optimistes et confortent ma conviction : la pauvreté n’est pas une fatalité, et cette conférence sera la conférence des solutions.
Trouver des solutions suppose avant tout de ne pas se tromper de diagnostic. Je veux saluer le travail remarquable réalisé sous l’autorité des « personnalités qualifiées ». Avec chacune, j’ai eu un échange nourri. Au-delà de l’expertise, reconnue de tous, j’ai vu des femmes et des hommes généreux qui ont décidé de mettre leur intelligence au service des plus démunis.
Je remercie tous ceux qui, avec la même sincérité, la même envie, ont participé aux groupes de travail et contribué à dresser un état des lieux et à dessiner des perspectives.
Cette somme de compétences et de volonté sera nécessaire, car la pauvreté s’est installée dans notre pays avec une vigueur particulière ces dernières années.
On constate depuis 2002, et plus encore depuis 2006, une augmentation jamais connue de la pauvreté : 8,5 millions de Français sont concernés ; un million de personnes de plus qu’il y a dix ans.
Pour la première fois depuis 2004, le revenu médian des Français a baissé. La crise que traverse notre pays est particulièrement dure pour nos concitoyens les plus fragiles, y compris pour celles et ceux qu’on croyait protégées parce qu’elles avaient un emploi.
Non seulement la pauvreté frappe durement, mais aujourd’hui elle a plusieurs visages.
Elle a le visage de ces immigrés qui sont cantonnés à la précarité et au travail illégal.
Elle a le visage de ces femmes qui vivent seules avec leur enfant. Presque un tiers d’entre-elles sont pauvres.
Elle a pris le visage de ces enfants dont le destin semble scellé : désormais la pauvreté s’hérite de génération en génération.
La pauvreté a pris le visage de ces jeunes qui sont sortis trop tôt de l’école et qui galèrent. Ces jeunes qui aujourd’hui n’ont rien, ni emploi, ni formation, ni ressource. C’est vers eux que nous devons nous tourner en priorité.
Redonner un horizon à la jeunesse de notre pays est la priorité du Président de la République.
C’est pour préserver l’avenir de la jeunesse que François Hollande a fait le choix courageux du désendettement de l’Etat.
Et c’est pour préparer cet avenir que le Président de la République veut réorienter la construction européenne vers plus de croissance, plus d’emploi, et plus de justice.
C’est pour construire cet avenir que les moyens de l’éducation nationale ont été augmentés et que nous proposons un pacte pour refonder l’école.
Pour cette jeunesse, pour tous ceux qui souffrent au quotidien et qui se privent de l’essentiel, nous devons agir.
C’est d’abord une obligation morale. Quand un enfant sur 5 vit dans la pauvreté, ce sont les fondements de la République qui sont atteints. La République, cet idéal qui nous unit, ce projet humaniste qui nous rappelle que nous formons une seule et même communauté, cette République là, exige que chacun vive dans des conditions dignes.
C’est aussi une nécessité économique. Un pays comme la France n’a pas les moyens de se priver d’une part considérable de ses forces vives, de ces hommes, de ces femmes qui manquent d’argent mais pas d’énergie. Le redressement de notre pays entrepris par le Président de la République et le Premier Ministre ne se fera pas en laissant 14% de la population sur le bord du chemin. La France se redressera si elle est unie, si elle est solidaire et si elle sait mettre à profit les compétences de tous.
La France, de l’Etat aux collectivités territoriales, des entreprises aux syndicats, la France dans toute sa pluralité, a cette double obligation, morale et économique, d’agir pour la solidarité.
Nous agirons avec principes.
Le premier de ces principes, c’est de respecter les personnes démunies.
De les respecter en abandonnant les discours de stigmatisation et de culpabilisation.
La Caisse nationale d’allocations familiales évalue à 5% la fraude au RSA. Hors, parallèlement, 68% des personnes éligibles au RSA activité ne le demandent pas ; 2 foyers très modestes sur 3 ne perçoivent pas les 130 euros mensuels auxquels ils ont droit. Il nous faut lutter avec fermeté contre la fraude et en même temps rétablir une vérité essentielle : les personnes démunies ne choisissent pas la pauvreté ; elles n’en profitent pas ; elles la subissent !
Je suis attachée à la notion de responsabilité. C’est parce que j’y suis attachée, que je refuse qu’elle soit dévoyée, qu’elle soit instrumentalisée pour diviser les Français.
La responsabilité, c’est celle de la République qui doit garantir les droits de tous. La République sait distinguer le désarroi de l’abus ; la République sait distinguer la relégation de la fraude ; et elle sait apporter, dans chaque cas, la réponse appropriée !
La responsabilité, c’est la méthode choisie par ce Gouvernement : ne pas céder à la politique de l’annonce.
Car c’est cela aussi le respect : ne pas promettre ce que l’on ne saurait tenir.
Cette conférence n’est pas un aboutissement ; elle est une étape importante pour définir un plan pluriannuel de lutte contre la pauvreté. Notre action se poursuivra tout au long de notre mandat, avec la même détermination. Tout ne pourra pas être réglé dans l’immédiat ; nous sommes lucides. Mais nous voulons avancer, dès maintenant ; et poursuivre notre effort, jusqu’au bout. Il ne s’agit pas de susciter l’espoir pour ensuite décevoir.
Nous donnerons à l’ensemble des acteurs de l’action sociale et aux usagers, les moyens de vérifier, en toute indépendance, la mise en œuvre du plan pluriannuel, d’en discuter les réussites et les échecs comme nous l’avons fait dans la préparation de cette conférence.
Le deuxième principe de notre action, c’est de ne pas traiter la pauvreté « à part ».
Les problèmes des personnes les plus démunies, ou de ces familles modestes qui vivent juste au-dessus du seuil de pauvreté, ce sont les problèmes de tous.
Le problème majeur, c’est le chômage.
On compte d’ailleurs trois fois plus de chômeurs pauvres que de travailleurs pauvres.
C’est pourquoi politique de lutte contre l’exclusion et politique de l’emploi se confondent. Cette bataille de l’emploi, le Président de la République et l’ensemble du Gouvernement, la mènent sur tous les fronts : celui de la réorientation de l’Europe, celui de la politique industrielle, celui de la formation, celui du dialogue social. Nous sommes entièrement mobilisés à réduire le chômage qui est un drame individuel et collectif.
Mais être pauvre, c’est aussi se priver de ce qu’il y a de plus essentiel : se nourrir. Plus de 800 000 personnes ont besoin de l’aide alimentaire pour manger.
Je profite de cette tribune pour réaffirmer la volonté sans faille de ce Gouvernement de se battre pour maintenir le programme européen d’aide aux plus démunis qui permet à 18 millions d’européens d’avoir un repas chaque jour.
Être pauvre, c’est abandonner le confort plus élémentaire. 8 millions 500 000 personnes dépensent plus de 10% de leur budget pour se chauffer ; beaucoup n’en ont tout simplement pas les moyens.
Être pauvre, c’est avoir de grandes difficultés à se soigner. Un Français sur 6 y renonce par manque d’argent.
Souvent, être pauvre, c’est ne plus pouvoir se loger ; ne plus avoir ce qui est la base de la vie sociale : un foyer. En France, 3,6 millions de personnes sont mal logées et 150 000 sont sans domicile fixe.
Dans tous les cas, être pauvre, c’est éprouver le manque ; c’est se sentir relégué ; c’est subir concrètement, dans sa chair, le poids des inégalités qui se creusent.
Tous ces sujets, nous allons les traiter de manière coordonnée. Chaque Ministre recevra, de la part du Premier Ministre et à l’issue de la conférence, une feuille de route qui formalisera les engagements volontaristes du Gouvernement.
Le troisième principe de notre action, c’est l’accès au droit pour tous.
Pourquoi des personnes ne demandent pas les prestations auxquelles elles ont droit ?
La complexité des dispositifs, l’ignorance-même de ces dispositifs, la lassitude, la stigmatisation des bénéficiaires, tout cela participe à ce que des personnes qui ont besoin d’aide, passent en réalité au travers.
Ce phénomène, c’est le non-recours.
Je veux faire de la lutte contre le non-recours une priorité.
Lutter contre le non-recours, c’est dire haut et fort ce qu’est la République, cette communauté qui protège, cette communauté qui élève, cette communauté qui fait le pari de la fraternité.
Pour améliorer nos dispositifs, nous avons tous constaté à l’occasion des groupes de travail préparatoires à cette conférence, à quel point la confrontation des points de vue entre experts, acteurs de terrain, et personnes bénéficiaires a été riche et féconde. Les personnes démunies elles-mêmes ont beaucoup de choses à dire sur les politiques qui les concernent. Leur parole a bousculé les acteurs institutionnels. Au regard de ces apports, je souhaite que l’idée de ce « huitième collège » puisse être généralisée dans la conception et le suivi de nos politiques publiques.
Nous ne sommes pas dans l’assistanat, nous sommes dans la solidarité.
Mesdames, Messieurs,
Tout ne sera pas réglé à l’issue de la conférence ; nous le savons. Mais cette conférence est l’occasion de mettre la pauvreté au cœur du discours de la République.
Un discours de décence : nous avons une dette à l’égard des personnes démunies, et non l’inverse !
Un discours de cohésion : sans cohésion, il n’y aura pas de redressement.
Un discours de justice : la pauvreté est insupportable dans un pays comme la France.
Notre pays restera un grand pays si les principes de la République continuent de nous inspirer. C’est la responsabilité du Gouvernement, c’est notre responsabilité.
Seul le prononcé fait foi.
Lundi 10 décembre 2012 – Palais d’Iéna, Paris