Il faut reconnaître aux débats de la primaire de la droite un mérite réel quoique non désiré par ses participants : ils dévoilent, par-delà les ego déchaînés et les postures surjouées, leur projet commun, libéral et anti-social. On nous avait promis une confrontation de visions pour l’avenir, on nous propose un grand bond en arrière. La primaire de la droite, c’est «la caméra explore le temps» : à chaque émission, les téléspectateurs ont l’impression d’assister à un conseil des ministres de 1986, 1993, 1995 ou 2007.
Le programme commun de la droite menace la République sociale et dans ce dessein, notre bilan collectif dérange. Voilà pourquoi les libéraux-conservateurs font tout pour le cacher ou le caricaturer. Puisque les cartes sont désormais sur la table, parce que l’essentiel est le choix du projet de société pour le pays, l’heure est venue de comparer leurs intentions et nos réalisations. Pour que les Français puissent aborder l’échéance présidentielle en toute connaissance de cause. Pour que personne ne puisse dire, une fois son vote accompli, qu’il ne savait pas.
Le projet de la droite : inégalitaire et autoritaire
A droite, leur projet est de réduire les protections dont bénéficient les Français. Ils veulent abroger les droits nouveaux que nous avons créés au cours de ce quinquennat – les suppressions du compte pénibilité et du tiers-payant généralisé sont annoncées – et aussi remettre en cause des conquêtes plus anciennes, inscrites par des luttes et des lois au cœur de notre modèle social. Ainsi, tous les chefs de la droite veulent repousser, à 64 ou 65 ans, l’âge légal de départ à la retraite. Nous, nous avons démontré, en ramenant le régime général à l’équilibre, qu’il était possible d’assurer l’avenir de notre système solidaire de retraite sans toucher à l’âge légal. Et nous avons même rétabli – c’était justice – le droit à la retraite à 60 ans pour nos concitoyens qui avaient commencé à travailler tôt.
Pour les salariés et les demandeurs d’emploi, la droite veut la flexibilité sans la sécurité, autrement dit la précarité. Face à nous qui avons voulu la sécurisation de l’emploi, le compte personnel d’activité et la démocratie sociale, elle prône la dégressivité des allocations-chômage (-20% à 25% au bout de 12 mois, puis encore -20% à 25% au bout de 18 mois) et la remise en cause des 35 heures. Elle stigmatise les partenaires sociaux en général et les syndicats en particulier. Inégalitaire, le projet de la droite est aussi autoritaire.
A droite, leur projet est de démanteler les services publics. A quoi, sinon à sa casse, conduirait un programme supprimant – selon les candidats – entre 200 000 et un million de postes dans la fonction publique ? Qui peut croire que cette destruction massive d’emplois publics épargnerait l’école, la santé, la sécurité, la justice ? Nous, nous avons créé 60 000 postes dans l’Éducation nationale – 80 000 avaient été supprimés sous le quinquennat Sarkozy. Nous en avons rétabli près de 9000 dans la police et la gendarmerie – plus de 12500 avaient été supprimés entre 2007 et 2012. Nous avons augmenté le budget de la Justice de 14 % en 5 ans et créé près de 600 nouveaux postes de magistrats. Nous, enfin, avons rétabli l’équilibre des comptes sociaux – ils accusaient un déficit de 17,4 milliards d’euros au début du quinquennat – sans déremboursements, «franchises» supplémentaires ou nouveaux forfaits. Comme toujours, la droite veut fragiliser la Sécurité sociale pour étendre le champ des assurances et du marché.
Absence de préoccupation écologique
A droite, leur projet est de baisser les impôts des plus riches et d’augmenter la fiscalité pour les autres, à rebours de la politique de justice fiscale engagée depuis cinq ans par la majorité. Nous avons conforté l’ISF ? Ils veulent le supprimer. Nous avons fait entrer les revenus du capital dans le barème de l’impôt sur le revenu ? Ils veulent les en sortir. Nous avons abaissé le plafond du quotient familial ? Ils veulent le relever. La doctrine de la droite ne change pas : pour quelques-uns, les bénéfices, pour tous les autres, des sacrifices.
Enfin, en cette semaine historique où l’accord universel de Paris sur le climat, pour lequel la France s’est ardemment battue, entre en vigueur, comment ne pas s’alarmer de l’absence totale de toute préoccupation écologique – et même de la résurgence des thèses climatosceptiques – dans les débats de leur primaire ? Pour le climat et l’environnement aussi, un retour de la droite serait un retour en arrière.
En définitive, le programme commun de la droite est celui qu’elle a présenté à chaque élection depuis des décennies, celui qu’elle a essayé de mettre en œuvre à chaque fois que la société ne lui a pas résisté. C’est celui auquel les Français ont échappé en 2012. C’est celui qui a causé les dégâts que nous avons eus à réparer jusqu’en 2016. C’est celui auquel les Français doivent faire barrage en 2017, pour que notre pays continue de redresser son économie, de consolider son modèle social, d’investir dans l’avenir.
Cosignataires :
Patricia Adam, députée du Finistère. Kader Arif, député de Haute Garonne. Guillaume Bachelay, député de Seine Maritime. Luc Belot, député de Maine et Loire. Karine Berger, députée des Hautes-Alpes. Christophe Borgel, député de Haute Garonne. Erwan Binet, deputé de l’Isère. Emeric Brehier, député de Seine-et-Marne. Marie-Arlette Carlotti, députée des Bouches du Rhône. Marie-Anne Chapdelaine, députée d’Ille-et-Vilaine. Jean-Michel Clément, député de la Vienne. Romain Colas, député de l’Essonne. Carlos Da Silva, député de l’Essonne. Guy Delcourt, député du Pas-de-Calais. Sébastien Denaja, député de l’Hérault. Françoise Dumas, députée du Gard. Frédérique Espagnac, sénatrice des Pyrénées-Atlantiques. Olivier Faure, député de Seine-et-Marne. Razzy Hammadi, député de Seine-Saint-Denis. Marietta Karamanli, députée de la Sarthe. Annick Lepetit, députée de Paris. Frédérique Massat, députée de l’Ariège. Sandrine Mazetier, députée de Paris. Nathalie Nieson, députée de la Drôme. Robert Olive, député des Pyrénées-Orientales. Elisabeth Pochon, députée de Seine Saint Denis. Catherine Quere, députée de Charente-Maritime. Dominique Raimbourg, député de Loire-Atlantique. Sylvie Tolmont, députée de la Sarthe.
Tribune publiée dans Libération.