Le Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées est une institution rattachée au Premier ministre créée en 1992 à la demande de l’Abbé Pierre dans le but de rendre effectif le droit au logement, en particulier pour les personnes les plus vulnérables. Le Haut comité a pour mission de faire toute proposition utile sur l’ensemble des questions relatives au logement des personnes défavorisées. Il émet également des avis, soit à la demande du Gouvernement, soit de sa propre initiative, sur tout projet de loi ou proposition de loi qui concerne le logement des personnes défavorisées. Le Haut Comité élabore chaque année un rapport qu’il remet au Président de la République et au Premier Ministre.
L’effondrement de trois immeubles de la rue d’Aubagne le 5 novembre 2018 à Marseille a jeté une lumière crue sur l’habitat indigne en France. Le Haut Comité s’est saisi de cette problématique dans le cadre de l’élaboration de son rapport annuel. Un état des lieux de l’habitat indigne en France ainsi que des politiques locales sur ce sujet en milieu urbain sera réalisée au préalable. Les travaux cibleront deux territoires, la Métropole de Marseille et le Département de la Seine-Saint Denis. Ces travaux ont débutés par le déplacement d’une délégation du Haut comité à Marseille le mercredi 27 mars 2019. La délégation a rencontré le Préfet, M. Pierre Dartout, le matin puis les délogés de la rue d’Aubagne et les acteurs locaux mobilisés contre l’habitat indigne à la salle de spectacle le Molotov.
Marie-Arlette Carlotti a annoncé le lancement des travaux : « Nous venons et reviendrons afin de pouvoir construire notre analyse de terrain, avec les associations, les offices HLM, la ville de Marseille… Pour ce rapport, nous ne voulons pas partir des dispositifs existants mais partir de l’expérience des sinistré.e.s pour faire des préconisations. » Yasmina Younes, membre du Haut Comité, au titre du Conseil National des Personnes Accompagnées réagit : « Je suis au HCPLD en tant que personne concernée : il est temps de nous associer vraiment dans ces concertations et de nous mettre au centre des préoccupations ». Les travaux du HCLPD visent à identifier les outils et les leviers d’actions, sans mettre en concurrence et opposer les publics.
Suite à ces rencontres, le sentiment ressenti par la délégation est que les délogé.e.s, les citoyen.ne.s et les collectifs accompagnants les sinistré.e.s sont abandonnés. Pour les collectifs et associations reçus, l’effondrement du 5 novembre a créé un « avant » et un « après », mais l’après n’est calibré ni sur le court terme face à l’urgence sociale ni sur le long terme sur la lutte contre l’habitat indigne. Les associations et collectifs sont intervenus pour dénoncer « un système de crises chronicisées, des dysfonctionnements structurels et une situation d’incapacité de pouvoir publics à répondre digne des pays du tiers-monde » selon Médecin du Monde.« Dans la gestion de la crise, on ne sait même pas combien il y a de gens à reloger, la ville est obligée de passer par des associations : elle n’est pas capable de gérer » rappelle Christophe Robert.
Selon le délégué général de la Fondation Abbé Pierre, il y a une « urgence immédiate » à agir. « Il faut impérativement des moyens extraordinaires pour soutenir les victimes et ceux qui leur apportent une aide.
L’habitat indigne est une responsabilité partagée entre la ville, la métropole et l’état via l’ARS, et ces responsabilités ne sont pas assumées. » « On est dans le déni du côté des autorités, il y a un manque évident de volonté politique» confirme Christian Nicol, président délégué de Soliha. « Les services ne sont pas réactifs, le préfet renvoie la responsabilité sur la mairie, le maire a répété que la responsabilité était du parc du privé» [alors que la police sur l’habitat en péril est une compétence municipale depuis 1830 ndrl].
Il faut mieux mieux mobiliser les logements sociaux qui se libèrent pour le relogement des sinistrés.
Néanmoins, l’urgence aujourd’hui reste, même 5 mois après, de répondre à une crise humanitaire « semblable à un séisme avec 3000 personnes délogées » selon les collectifs. Gilles Desrumaux, l’ancien délégué général de l’UNAFO dénonce la « grande souffrance de la population qui se sent à l’abandon depuis la crise ». « Je suis frappée par l’incurie des pouvoirs publics » avance-t-il après ces premières rencontres. « Il n’y a pas eu une mobilisation, ni de stratégie ni des moyens déployés, pour faire face à cette crise. Les collectifs citoyens sont seuls face à la citoyens et notre rôle et de les soutenir et de susciter dans le temps une attention continue sur ces sujets. »
Le HCLPD souhaite rappeler que les outils légaux existent, qu’avec la volonté politique, nous pouvons résorber le logement indigne en France, et ce sans mettre en concurrence et opposer les publics.